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L’ex ombudsman Kurteshi : Au Kosovo s’est installée une dictature policière
L’ex-avocat du peuple kosovar Sami Kurteshi, membre actif du parti Vetëvendosje, (Autodétermination) n’a pas été épargné par la police le 28 novembre, quand les forces de l’ordre ont attaqué les responsables du parti. Kurteshi affirme que la police ne s’est pas abstenue d’en faire recours à des attaques physiques, car elle en avait reçu l’ordre du […]
L’ex-avocat du peuple kosovar Sami Kurteshi, membre actif du parti Vetëvendosje, (Autodétermination) n’a pas été épargné par la police le 28 novembre, quand les forces de l’ordre ont attaqué les responsables du parti. Kurteshi affirme que la police ne s’est pas abstenue d’en faire recours à des attaques physiques, car elle en avait reçu l’ordre du gouvernement. Lors de sa brève entrevue avec Albinfo.ch, il nous dévoile que la démocratie au Kosovo est inexistante, « tragiquement, nous avons affaire à une dictature policière » nous dit-il.
Albinfo.ch : Vous avez été avocat du peuple, et à la fin de votre mandat vous avez décidé de faire de la politique. Pourquoi cela ?
Kurteshi : J’ai toujours été actif politiquement, même lorsque j’exerçais le métier d’avocat, mais pas à l’intérieur parti politique. La fonction même d’avocat du peuple, comme toute autre fonction au sein des institutions de l’État, est une fonction politique. L’homme est un être politique. Un être non politique ne peut pas remplir cette fonction. Par conséquent, je n’ai opéré qu’un changement de fonction, mais pas un changement de principe.
Albinfo.ch : Vous avez défendu les droits du peuple, mais la police ne vous a pas épargné. Qu’est-ce que cela veut dire dans une démocratie ?
Kurteshi : La défense des droits de l’homme, qui est l’un des rôles de l’avocat du peuple, était une obligation constitutionnelle. En dehors de cette fonction, au sein d’un parti politique, la protection des droits de l’homme reste une obligation morale et civique. Mon engagement pour les droits humains a commencé bien avant que je n’exerce la fonction d’avocat du peuple.
Le comportement de la police envers moi, le 28 novembre 2015, a prouvé une fois de plus que j’avais raison sur la police et toutes les institutions du Kosovo, qui sont seules compétentes et détiennent le monopole légal de l’usage de la force.
À la seconde question je répondrai par une autre. Le Kosovo est-il une démocratie ?
Albinfo.ch : Vous avez choisi le parti Vetëvendosje, un parti qui est considéré comme le plus extrême de la scène politique au Kosovo. Pourquoi ce choix ?
Kurteshi : « le plus extrême du spectre politique au Kosovo », c’est un constat qui vient principalement d’une clique politique criminalisée et corrompue. Garder des principes, rester incorruptible, œuvrer pour une société construite sur la base d’un discours politique démocratique, sur la base de valeurs libérales, une société de l’égalité des chances pour tous, ceci est un noble idéal pour moi. Pour certains cela s’appelle extrémisme politique.
J’ai choisi ce parti parce que je crois que c’est celui qui est le plus proche de mes opinions philosophiques, politiques et programmatiques sur les développements sociaux et institutionnels.
Quand je dis « le plus proche », je veux parler du critère de base que doit avoir une entité ou un parti politique, à mon avis : la démocratie interne. En accord avec mes convictions, Vetëvendosje se distingue par une démocratie interne relativement développée, permettant la similitude, l’alignement, mais ne nécessitant pas nécessairement une uniformité de pensée politique.
Albinfo.ch : Vous défendez les droits du peuple ou ceux du parti Vetëvendosje ?
Kurteshi : Les droits de l’homme ! Les droits du parti, en tant que concept sociologique, font partie intégrante des droits humains. Les droits du parti, en tant que concept politique, font partie de la démocratie. Les deux font partie du vaste corpus des droits de l’homme. Les droits humains sont indissociables du noyau de la philosophie politique de Vetëvendosje.
La défense des droits de l’homme, pour moi, en relation avec ma culture politique et mon concept de philosophie politique, est l’une des exigences de base de toute action politique.
Albinfo.ch : Selon vous, la police kosovare a-t-elle été très violente ?
Kurteshi : Il ne s’agit plus de violence mais de terrorisme envers des citoyens, des activistes politiques. On est passé d’une démocratie fragile à une dictature policière.
Tout a commencé le 28 novembre, quelques heures seulement après la manifestation politique pacifique de milliers de citoyens, qui s’est déroulée sans un seul incident et qui prouve le caractère pacifique de l’opposition. Évidemment, cela a enragé les politiques au pouvoir au Kosovo, dirigé par le trio Thaçi-Mustafa-Veseli. L’événement qui a eu lieu seulement une heure avant les manifestations, prouve incontestablement qu’au Kosovo nous avons affaire à des bandes criminelles organisées au sein de la police, au sein du gouvernement et au sein de l’Assemblée. L’intervention sanglante de la police lors de la manifestation le jour de la fête du drapeau est un acte criminel, dirigé et mis en œuvre par certains personnages politiques, à commencer par Hashim Thaçi, Isa Mustafa, Kadri Veseli, Skender Hyseni et Shpend Maxhuni. Le comportement criminel de la police devrait être poursuivi d’office par le procureur de la République. Mais aucun procureur au Kosovo ne le fera car tout cela fait partie de la criminalité organisée institutionnelle.
Albinfo.ch : Pouvez-vous commenter les détentions des députés de l’opposition ?
Kurteshi : Cela ressemble aux actes de la Gestapo nazie au Reichstag, en Allemagne en 1933.
L’opposition, qui paie un prix élevé pour rétablir la dignité du parlement, sur le court terme se retrouve blessée en termes humains et politiques. Sur le long terme, cette opposition sera considérée comme le gardien de la démocratie parlementaire. Chaque bataille, chaque guerre, a son prix. La liberté et la démocratie ont un prix très élevé. L’opposition actuelle paye ce prix.
Albinfo.ch : Selon vous, l’opposition doit retourner a l’Assemblée ?
Kurteshi : L’opposition a été expulsée du Parlement !
Mais même cette situation a un côté positif pour l’avenir. Pour la première fois dans la République du Kosovo, l’opposition a montré que le Parlement ne se laissera pas prendre en otage et ne se laissera pas intimider par le gouvernement. L’opposition veut transformer le Kosovo en une république parlementaire démocratique. Ce sera la plus grande victoire pour l’avenir.
Albinfo.ch : Vetëvendosje n’a-t-elle pas provoqué la police lors de l’arrestation d’Albin Kurti ?
Vetëvendosje n’a jamais provoqué les policiers ! Même pas lors de l’intervention de ces derniers alors qu’ils procédaient à des saisies, vols et destructions dans les bureaux de Vetëvendosje. La police a volé tous les enregistrements des caméras de sécurité au siège de Vetëvendosje ce jour-là. Cela s’est fait afin d’effacer toutes traces des violences exercées par la police ce jour au siège du parti.
L’intervention de la préfecture de police était de type fasciste : sans avertissement, exécutée par une centaine de membres des forces d’intervention rapide anti-terroristes, équipées d’armes à feux, sans mandat de perquisition et sans mandat d’arrêt. Tout cela au nom de l’arrestation d’Albin Kurti.
Albinfo.ch : Qu’avez-vous à dire concernant les gaz lacrymogènes et la violence à l’Assemblée ?
Kurteshi : L’usage de gaz lacrymogène par les membres des partis d’opposition lors des sessions de l’Assemblée n’est ni parlementaire, ni démocratique.
Si l’on ne prend pas en compte les circonstances et les développements politiques dans le pays, l’utilisation de gaz lacrymogènes à l’Assemblée constituerait une infraction pénale condamnable.
Cependant, il faut tenir en compte le fait que les députés de l’opposition n’avaient aucun autre moyen pour empêcher la réalisation d’infractions encore plus graves, à savoir l’effondrement du système constitutionnel et la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale par la perte du territoire national. L’utilisation de gaz lacrymogènes pour empêcher une infraction plus grave n’est pas un mode d’action souhaitable, mais il était néanmoins nécessaire dans ces circonstances. Avec l’utilisation du gaz lacrymogène, l’opposition a atteint son objectif qui était la résiliation de sessions de l’Assemblée sans violence, avant l’approbation de lois anticonstitutionnelles par le gouvernement.
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