Kosova

Expertise suisse pour éclaircir la mort du jeune Astrit

Astrit Dehari, jeune militant de 26 ans, né en Suisse, avait été retrouvé sans vie le 5 novembre 2016, dans une cellule de la prison de Prizren, au sud-ouest du Kosovo. Sa mort est jugée très suspecte aux yeux de sa famille, qui demande l’expertise de légistes suisse.

La mort d’Astrit, militant actif du principal mouvement politique d’opposition « Vetëvendosje » (Autodétermination) et étudiant en 6e année de médecine à l’Université de Prishtina (capitale du Kosovo), n’en finit pas de revenir sur la scène politique du Kosovo. La mort d’Astrit survenue dans des circonstances suspectes avait aussitôt provoquée une onde de choc et de colère auprès de la population kosovare et des jeunes militants de Vetëvendosje. Ce mouvement politique, depuis les élections législatives du mois de juin 2017, est désormais devenu la principale formation politique du pays.

Depuis le décès tragique de ce jeune homme, des manifestations avec le slogan «Justice pour Astrit» sont systématiquement organisées au Kosovo, en Suisse et par les proches et des jeunes militants de ce mouvement. Pour rappel, Astrit Dehar avait été placé en détention le 30 août 2016, pour avoir participé à une manifestation de l’été 2016, durant lesquelles des cocktails Molotov avaient été lancés par des manifestants contre le Parlement du Kosovo. Le jeune Astrit n’avait été interrogé qu’au bout de 68 jours de sa détention.

Cette affaire est particulièrement suivie par la diaspora albanaise en Suisse, car le père d’Astrit, Avni Dehari, avait trouvé refuge en Suisse en 1981 où ses trois enfants sont nés. Poursuivi par le régime de l’ex-Yougoslavie, il a été contraint d’abandonner son métier d’enseignant de langue albanaise, pour venir s’installer, à Berne. Rejoint par son épouse, Xhemile Dehari, peu de temps après, les parents d’Astrit poursuivent leur engagement politique en faveur du mouvement LPK (Mouvement populaire du Kosovo, à l’origine de la fondation de l’Armée de Libération du Kosovo), un engagement qu’il ont transmis, avec conviction, à leurs trois enfants. C’est pourquoi, 20 ans plus tard, la famille Dehari avait alors décidé de retourner au Kosovo pour «construire le pays ». Astrit, qui est né et a grandi dans la banlieue de Berne-Bümplitz, avait alors à peine 12 ans..

Deux ans avant le décès d’Astrit, son frère, Arbnor Dehari, était également mort dans des circonstances douteuses. Il serait tombé du sixième étage d’un appartement. Le grand frère d’Astrit était également un fervent militant du Mouvement Vetevendosje .

Mais que s’est-il réellement passé ce triste 5 novembre 2016, où Astrit a trouvé la mort ?   S’agit-il d’un deuxième meurtre politique ou d’un deuxième suicide ?

Les autorités avaient très rapidement conclu à un suicide provoqué par l’ingestion de médicaments, puis s’étaient aussitôt rétractées pour donner une nouvelle version des faits. Cette fois-ci, elles avaient livraient une explication bien plus surprenante encore : « Astrit Dehari se serait tout simplement asphyxié par l’ingestion d’une bouteille en plastique ». Tomë Gashi, l’avocat qui est en charge de représenter la famille du défunt, avait alors démontré qu’il était impossible d’introduire une bouteille de 6 cm dans la trachée du jeune défunt sans exercer une forte pression. Une thèse que même les médecins n’avaient manqué de confirmer. Tout porte à croire, « si l’on se base sur les photos de l’autopsie, qu’il s’agit d’un passage à tabac ou d’un interrogatoire qui a mal tourné », avait alors affirmé l’avocat de la famille d’Astrit.  Compte tenu des fortes contradictions, et des zones d’ombres de cette affaire, la famille avait aussitôt réclamé la formation d’une commission d’enquête indépendante.

Une année plus tard, alors que le  procureur en charge du dossier Dehari, Metush Biraj a confirmé que l’enquête sera bientôt bouclée,  l’avocat de la famille d’Astrit, a publié un document qu’il a adressé au Premier ministre Ramush Haradinaj, qui a également vécu en Suisse.  La famille demande une enquête indépendante  et une expertise indépendante suisse concernant la mort de leur fils Astrit Dehari.  Sur son poste Facebook, l’avocat  Gashi a fait savoir que les parents d’Astrit sont convaincus que M. Haradinaj pourrait jouer un rôle pour une issue de cette affaire et qu’il solliciterait les services de l’institution suisse pour éclaircir toute cette affaire.  “La famille Dehari vivait en Suisse et à confiance en la justice suisse. Il appartient maintenant au Premier ministre Haradinaj d’approuver ou non cette demande “, a déclaré l’avocat de la famille Dehari.