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CFR – Droits fondamentaux : la liberté d’expression trouve sa limite avec le respect de la dignité humaine

Peut-on tout dire au nom de la liberté d’expression ? Quelle est la différence entre ce qui est punissable et ce qui ne l’est pas ? La norme pénale antiraciste est-elle en contradiction avec la liberté d’expression ? Où se termine la liberté d’expression et quand commence le discours de haine ? À l’heure où la liberté d’expression est souvent malmenée, voire dévoyée sur les réseaux sociaux, ce sont quelques-unes des questions qu’empoigne le nouveau numéro de la revue TANGRAM, la publication de la Commission fédérale contre le racisme (CFR).

Dès ses débuts, la norme pénale antiraciste a été attaquée sur la base d’un argument récurrent : l’art. 261bis du code pénal constituerait une entrave et une menace à la liberté d’expression. Qu’en est-il réellement ? Au travers d’articles et d’opinions émanant de juristes, historiens, sociologues, politologues, journalistes et théologiens, TANGRAM fait le point sur le baromètre de la liberté d’expression contemporaine et met cette dernière en miroir avec les enjeux de la lutte contre le racisme. En réalisant ce numéro, la CFR a veillé à la diversité des opinions, y compris celles qui ne reflètent pas nécessairement les positions de la commission.

Une analyse des jugements prononcés au nom de la norme antiraciste, menée par la juriste Vera Leimgruber, démontre que l’art. 261bis est appliqué avec une extrême modération et que la liberté d’expression a toujours été un élément qui a pesé dans les décisions judiciaires. « La liberté d’expression n’est pas la liberté de dire ce que l’on veut. Les propos qui portent atteintes à la dignité humaine ne peuvent en aucun cas être protégés par la liberté d’expression » rappelle dans ce numéro le Professeur en droit Gerhard Fiolka. Mais la loi ne suffit pas selon lui: « Une réaction symbolique de l’État sur les opinions exprimées permet d’une part de mettre en évidence les propos qui sont admissibles dans un État de droit démocratique et ceux qui ne le sont pas ».

TANGRAM se penche également sur la problématique croissante des discours de haine, qui ont trouvé un terreau propice avec Internet. La liberté d’expression y sert très souvent à justifier ces discours au détriment de groupes minoritaires. Pour Thomas Jammet et Diletta Guidi « ce qui se passe dans l’espace public virtuel a un impact bien réel. Malgré le fait qu’ils s’expriment à distance, le racisme, le harcèlement et l’intimidation sont des phénomènes concrets, dont les conséquences n’ont rien d’abstrait ». Dans une interview, l’ancienne vice-présidente de la Cour européenne des droits de l’homme Françoise Tulkens s’inquiète de la banalisation du discours de haine : « Les discours de haine sont devenus un problème social et politique majeur dans les pays européens. Les États doivent prendre leurs responsabilités et intervenir avec force sur ce terrain-là ».

« Nul n’est censé ignorer la loi et qui s’en écarte doit s’attendre à en assumer les conséquences. C’est le prix à payer pour chacune de nos libertés, liberté d’expression incluse » estime pour sa part Martine Brunschwig Graf, présidente de la CFR.