Avec l’Euro, le business de l’aigle bicéphale prend son envol

Depuis la qualification de son équipe nationale, l’Albanie s’essaye au merchandising et à la vente de produits dérivés. Cela marche bien mais cela irait mieux sans la prolifération des contrefaçons

Pour la première fois de son histoire, l’Albanie est l’une des 24 protagonistes du Championnat d’Europe de football en France. L’intérêt national et international est grand pour cette équipe parfois présentée comme la «Cendrillon» de l’Euro, qui a su donner une bonne image malgré la défaite lors du premier match contre la Suisse (0-1). Depuis la qualification de «Kombëtare» (la Nationale), la Fédération albanaise de football (FAF) tente de surfer sur buzz en développant le merchandising, une pratique jusqu’ici embryonnaire.

La tenue officielle de l’équipe nationale, présentée fin janvier, est rouge avec un aigle, alors que le short est noir, reprenant fidèlement le drapeau national. Le maillot, appelé «Triumph», est un produit de la haute technologie qui met l’accent sur les symboles albanais. Dans le col est écrite la célèbre phrase du poète Naim Frashëri: «Albanie tu m’honores», afin d’inspirer encore un peu plus les joueurs.

Bien que l’on ne puisse pas dire que l’Albanie possède une véritable industrie d’affaires, on observe que le business rouge et noir sur fond du logo officiel de l’équipe nationale gagne de plus en plus de terrain. C’est le produit phare de la fédération (FAF). «Pendant des années, nous avons eu l’ambition de réaliser quelque chose de spécial, déclare Gazmend Malo, directeur marketing de la Fédération albanaise de football. Notre qualification a augmenté l’intérêt des marques d’articles de sport. «Parmi ces entreprises, nous avons sélectionné la société italienne «Macron», basée à Bologne, avec qui nous avons conclu un accord de coopération jusqu’en 2021 et portant sur six millions d’euros.»

Avant le début de l’Euro, Macron avait déjà écoulé plus de 50 000 maillots de l’équipe d’Albanie. «Ce nombre devrait encore augmenter d’ici la fin de la compétition. Tous les Albanais veulent se démarquer de manière digne, en portant sur eux autant de symboles que possibles», souligne Gazmend Malo. La Fédération a ouvert début juin un magasin officiel à Tirana et un site internet (www.fshf.org) pour vendre ses produits sous licence. «Nous travaillons en parallèle avec la «Prishtina Arena» et la «Tirana Arena», lieux où nous entendons vendre nos produits autorisés et les promouvoir», souligne encore le directeur marketing de la fédération.

Grâce au site web officiel, les ventes en ligne ont été nombreuses. Le troisième maillot, gris avec des manches noires, est déjà en rupture de stock. Les études commerciales ont montré que les achats venaient majoritairement de Suisse et d’Allemagne. Ce n’est pas surprenant. Les Albanais de Suisse forment une importante communauté, qui plus est très attachée aux traditions et aux coutumes. Leur amour du drapeau bicéphale est fort. «Je pense que les Albanais vivant en Suisse sont intégrés à la société. Mais ils sont restés proches de leur pays d’origine. Nous avons toujours eu de nombreuses demandes des différentes régions de Suisse, ainsi que de l’Europe du Nord. Ce sont des pays où le «marché rouge et noir» est florissant», se réjouit Gazmend Malo.

Les affaires seraient meilleures si des contrefaçons du maillot officiel ne circulaient pas largement sur le marché parallèle. Si le maillot original coûte entre 69 et 79 euros, il ne coûte qu’entre 20 et 25 euros au marché noir. Une différence de prix qui incite un nombre croissant de supporters à se passer du logo de la fédération. Celle-ci travaille activement avec les forces de l’ordre pour contrer cette concurrence.

Malgré cela, Gazmend Malo a toutes les raisons d’être satisfait car l’Albanie rassemble tous les ingrédients pour être au centre de l’intérêt. «Nous attirons la curiosité, notamment parce que nous sommes dans le même groupe que la France et que nous avons joué contre la Suisse un match au parfum de derby. Ces éléments, conjointement à un certain nombre d’autres facteurs, rendent le pays très intéressant à tous les niveaux du jeu, ce qui stimule le développement du business de l’aigle bicéphale», conclut-il.

Article paru dans « Le Temps », dans le cadre d’une opération commune avec « Albinfo.ch »