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Fête du 1er août 2022: Discours du président de la Confédération à Ouchy
Discours du président de la Confédération et chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) Ignazio Cassis - Seul le texte prononcé fait foi
Depuis ce matin, depuis que je suis monté dans le train de 8 :01 à Lugano, j’ai senti une émotion profonde monter en moi. Tout au long du trajet j’ai fait de belles rencontres, accompagné par une équipe des jeunes qui prendra un jour notre relève. Après une première étape dans le Canton de Zürich (Knonau), nous nous sommes arrêtés à Granges, dans le Canton de Soleure, puis à Yverdon et maintenant me voici arrivé au terme de mon voyage, au paradis. Oui, Mesdames et Messieurs, ici à Ouchy – au bord de ce magnifique Léman – nous sommes au paradis !
Je sais que plusieurs d’entre vous ressentent aussi une émotion spéciale, en ce jour spécial. Plus qu’une émotion, pour moi c’est un sentiment. Le sentiment de reconnaissance pour notre patrie! La reconnaissance d’avoir la chance de vivre en liberté, en sécurité, dans une démocratie solide. Une démocratie qui valorise ses diversités, une démocratie qui cultive sa richesse culturelle. Ce soir un Tessinois vous parle à Lausanne et un Vaudois – le conseiller fédéral Guy Parmelin – parle au Tessin, à Sessa, dans le village de mon enfance.
Ceci est une chance inestimable, mais aussi une grande responsabilité, individuelle comme collective. La liberté et le respect, en effet, ne vont pas de soi. Ils se cultivent tout au long des générations et c’est notre devoir – à nous toutes et nous tous – de les préserver.
Il est vrai que depuis quelque temps, notre résistance est mise à rude épreuve.
Nous subissons des bouleversements climatiques : canicule, intempéries, incendies. Nos cultures souffrent, nos lacs sont asséchés, nos glaciers fondent et – ces jours là – nous avec eux.
Nous avons aussi découvert le Covid, et avec lui les confinements, le port du masque, le télétravail. Certains d’entre nous ont perdu des proches, d’autres ont vécu des terribles périodes d’incertitudes.
Et, comme si ceci n’avait pas été suffisant, l’impensable s’est produit le 24 février dernier : une nouvelle guerre a éclaté sur le sol européen, à 2300 km d’ici. L’attaque brutale de la Russie contre l’Ukraine, avec son lot d’horreurs, ses victimes et ses millions de réfugiés.
Des femmes et des enfants qui ont dû fuir leur maison, leur patrie, laissant leurs maris, leurs pères sur place, pour défendre leur patrie.
Cette guerre marque la fin d’une époque et le début d’une nouvelle ère, avec toutes ses incertitudes. Cette guerre remet en question notre système de sécurité en Europe, elle redéfinit les équilibres de la planète. Cette guerre nous oblige à revoir rapidement nos sources d’approvisionnement énergétique. Elle menace de famine l’Afrique et le Moyen-Orient. Cette guerre exacerbe les conséquences de la pandémie, comme l’endettement des Etats. L’inflation est ainsi de retour, même si – pour l’instant – elle nous frappe moins que nos pays voisins et amis. Cette guerre nous plonge dans une période d’instabilité et nous devons nous y préparer.
Pas de doute : il y a deux ans et demi, nous vivions dans un autre monde.
Mais qu’est-ce que cela signifie pour la Suisse, pour notre sécurité, pour la liberté, pour la prospérité, pour notre indépendance ? Sommes-nous prêts à accepter que nos intérêts personnels puissent – tout au moins partiellement – passer au second plan ? Et que nos intérêts nationaux ne puissent plus être défendus par nous seuls, mais en coopération avec des pays qui partagent nos mêmes valeurs? Sommes-nous prêts à relever les défis qui nous attendent ?
La réponse est oui ! Mesdames et Messieurs, j’en suis persuadé. Nous aurons la force et le courage de parler de sécurité, de neutralité, d’approvisionnement énergétique, de renchérissement. C’est dans des moments de crise que la puissance de notre pays s’exprime au mieux, que la responsabilité de chaque citoyen se manifeste pleinement. Car c’est bien cela qui a fondé la Suisse que nous connaissons !
En recentrant la politique sur l’essentiel, en nous concentrant davantage sur les questions d’avenir, nous – les citoyens avec nos institutions – nous avons certainement les ressources de faire face à cette nouvelle période de tensions. Avec humilité et modestie, puisqu’il n’y a pas de baguette magique nationale pour résoudre les crises planétaires.
Je vous parlais tout à l’heure du sentiment patriotique. La patrie évoque un lien d’appartenance, d’attachement. La patrie est identité. Et c’est tellement vrai en Suisse, avec toute notre diversité. La pluralité des langues, des cultures, mais également de nos histoires et de nos sentiments ne sont pas, chez nous, un facteur de division. Bien au contraire, cette diversité nous unis ! Bien sûr, ce n’est pas toujours facile et nous nous moquons souvent – mais avec bienveillance – des autres cultures. Mais cette pluralité, avec les institutions qu’elle a su créer au fil du temps, est notre identité.
J’ai fait mes études de médecine à l’Université de Zürich, j’ai travaillé et je me suis marié dans ce beau canton de Vaud et je suis enraciné au Tessin. Vous voyez, la patrie est bien plus que le simple lieu où l’on habite. La patrie est un sentiment. Et je dois reconnaître que ce sentiment m’a envahi toute la vie – comme il l’a fait aujourd’hui lors de mon voyage au travers de la Suisse.
Pour nous la patrie est bien sûr également un sentiment de liberté et de sécurité. Mais ce n’est malheureusement pas le cas pour des millions de personnes dans le monde.
Pensez à l’Ukraine. Imaginez votre pays en ruines, votre maison détruite, ne pas savoir de quoi seront faits vos lendemains. Imaginez ce que c’est que de vivre avec la destruction et la mort, et de devoir fuir. Ces hommes-là, ces femmes-là avec leurs enfants, vivent dans le désespoir, le deuil et la peur. Leur vie a été chamboulée du jour au lendemain. Leur détresse nous renvoie à notre propre confort, avec cette terrible mais nécessaire prise de conscience : Il ne va pas de soi d’être libre et d’avoir un chez-soi.
J’ai évoqué la traversée de Suisse que j’ai effectué aujourd’hui. La première étape m’a mené à Knonau. Vous avez peut-être en mémoire ces faits historiques : Knonau, près de Gisikon, 1847, guerre du Sonderbund. Le canton de Vaud était alors du côté des vainqueurs. Ce fut la dernière guerre sur sol suisse. Elle fut suivie par l’adoption de la Constitution fédérale en 1848. Depuis cette date, nous vivons en paix et en liberté.
Comme je vous l’ai dit : cela ne va pas de soi. C’est un privilège pour lequel nous devons nous engager – toutes et tous. La solidarité envers les réfugiés de guerre fait partie de cet engagement. Nous sommes appelés à apporter notre aide à ces familles, ayant trouvé refuge chez nous, pour qu’elles puissent continuer à éprouver, elles aussi, ce sentiment de patrie, pour les aider à reconstruire leur pays.
Toutes ces crises qui se chevauchent en cette année présidentielle sont un défi, mais également un enrichissement. Je suis fier d’être le président d’un pays qui, en l’espace de quelques jours, a ouvert ses portes et son cœur à plus de 50 000 personnes en détresse. Je suis fière de vous – Mesdames et Messieurs – qui avez ouvert les portes de vos foyers pour accueillir ces mères et leurs enfants !
Car c’est également ça, la patrie. La patrie c’est « nous ». Et si nous sommes aujourd’hui dans une situation enviable par rapport à d’autres, les défis planétaires nous concernent nous aussi. Car ce vaste monde est également notre chez-nous.
Le temps est venu de se serrer les coudes. Tout ne peut pas être garanti. Pensons davantage à la génération suivante, à préserver notre patrie, avec responsabilité, modestie, diligence et solidarité. Pour la Suisse, notre patrie, pour la Suisse, nation exportatrice, et pour la Suisse, membre de la communauté internationale.
Sa réussite, la Suisse la doit à ces atouts qu’elle a su mettre à profit. Faire preuve de mesure dans les périodes fastes et ne pas désespérer dans les périodes moins favorables, nous permet de résister aux crises. Nous sommes riches de cette sagesse héritée de 731 ans d’histoire. Nous avons appris à vivre ensemble, à nous engager pour la démocratie.
Ce qui est bien plus précieux que tous les joyaux du monde. A nous tous et toutes de le préserver, grâce à notre engagement quotidien !
Joyeuses fêtes du 1. Août ! Vive la Suisse !
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