Kosova
Le rôle et la contribution des ONG kosovares dans la mobilisation du potentiel des jeunes
La première table ronde dans le cadre de TAKIMI a eu lieu le 24 mars 2022 et a été menée par des représentants des ONG kosovares et suisses. Dans cette conversation intitulée « La contribution des ONG kosovares à la cohésion sociale. Quels défis ? », les panelistes ont échangé autour des possibilités de mobiliser le potentiel de la jeunesse kosovare vers l’accomplissement de leurs rêves au Kosovo.
La population du Kosovo continue d’être l’une des plus jeunes à l’échelle européenne. D’après une stratégie du Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, la tranche d’âge comprise entre 15 et 24 ans représente 20% de la population du Kosovo. Ce segment de la population représente une part importante des actifs du pays. Ainsi, qu’il s’agisse de leur aspect social ou économique, ces chiffres devraient être très prometteurs. Or, en raison de différents facteurs, une partie considérable de ces jeunes considèrent sérieusement l’option de quitter le pays dans lequel ils ne voient pas de perspective. Selon l’Agence kosovare des Statistiques, rien que dans la dernière décennie, plus de 200 000 citoyens ont quitté le pays. Sur la seule année 2020, neuf mille Kosovars ont émigré pour des raisons allant du regroupement familial au mariage, en passant par l’emploi, la réinstallation définitive, les études à long terme et cætera.
Au vu des chiffres de cette émigration, le défi principal s’avère de trouver un moyen pour que ces jeunes puissent trouver des perspectives dans leur pays ainsi que de créer des mécanismes efficaces pour qu’ils puissent intégrer le marché du travail. Dans cette optique, l’association Albinfo.ch, en tant que porte-parole de la diaspora kosovare et albanaise, s’est engagée à mettre à disposition un espace de discussion approfondie sur ce sujet et à essayer de trouver des solutions communes qui procèderaient ces discussions.
La première table ronde dans le cadre de TAKIMI a eu lieu le 24 mars 2022 et a été menée par des représentants des ONG kosovares et suisses. Dans cette conversation intitulée « La contribution des ONG kosovares à la cohésion sociale. Quels défis ? », les panellistes ont échangé sur les possibilités de mobiliser le potentiel de la jeunesse kosovare vers l’accomplissement de leurs rêves au Kosovo. À cette première table ronde, tenue dans le lapidarium du Musée national du Kosovo, ont participé Zana Hoxha, directrice de l’organization « Artpolis », Sihana Bejtullahu, co-directrice de l’organisation « Germin », Migjen Kajtazi, représentant du Bureau cantonal pour l’intégration des étrangers et la prévention du racisme, attaché au Département de l’Économie et des Sports, ainsi que Bulent Kaya, chef de projet à la Croix-Rouge suisse. Cette discussion a été modérée par le journaliste Arbër Selmani.
Lors de cette conversation, les participants ont présenté la contribution de leurs organisations respectives, en partageant leurs expériences selon leur pays d’origine.
« L’idée selon laquelle l’herbe est toujours plus verte ailleurs plutôt qu’au Kosovo, doit être renversée. Ce n’est pas vrai. Même en Suisse, la vie n’est pas meilleure qu’ici, si l’on ne sait pas comment y fonctionner, si l’on ne travaille pas, si l’on n’est pas en recherche constante de nouvelles manières de développer ses capacités en lançant de nouveaux projets, que ce soit en coopération avec les autres ou à travers des initiatives individuelles. Sans cela, même en Suisse je ne crois pas qu’on puisse avoir une vie heureuse. Il ne faut pas se mentir » a déclaré Hoxha, en ajoutant qu’il est important de savoir qu’au Kosovo il y a bien des emplois et que tout travail honnête doit être respecté.
En revanche, en raison de divers facteurs, il existe une perception générale selon laquelle, au Kosovo, il n’y aurait pas de perspective pour les jeunes. Il y a eu, après la guerre, et même après l’indépendance du Kosovo en 2008, un grand enthousiasme pour reconstruire le pays, la société, et pour aller de l’avant. Or, cet enthousiasme a commencé à décroître dans les années 2014-2015 lorsqu’une grande vague de Kosovars a émigré vers l’Europe de l’ouest, avec l’idée qu’à l’étranger, un travail plus correct serait plus facilement accessible.
Sihana Bejtullahu, se référant à la période de l’après-indépendance, considère que cette perception a été influencée par différents facteurs.
« Il n’y a pas vraiment eu de plan concret sur la manière dont les jeunes allaient passer du parcours d’éducation scolaire au marché du travail. Il y avait donc un grand écart entre ce que les jeunes étudiaient et ce qu’ils allaient faire après avoir terminés leurs études. Une fois sur le marché du travail, les exigences ne sont pas les mêmes. Il est d’ailleurs tout à fait normal que la volonté de travailler aille de pair avec le désir d’exercer un certain type de travail, étant donné les études et les efforts que l’on fait pour les terminer. Ainsi, cet écart mène vers le désespoir. », a ajouté Bejtullahu. Selon elle, un autre aspect important est le manque de volonté des jeunes de faire partie des processus décisionnels.
« Ce n’est pas que nos jeunes n’aiment pas travailler, mais cette perception a été influencée par de nombreux facteurs. » a-t-elle déclaré, en ajoutant que la jeunesse kosovare est saine et talentueuse, et que les succès accomplis par certains jeunes Kosovars ont déjà traversé les frontières du pays.
A partir de son expérience en tant qu’employé d’une institution étatique, mais également de son expérience associative, Migjen Kajtazi a estimé qu’il existe des initiatives de coopération entre les citoyens du Kosovo et la diaspora kosovare, bien qu’il reste toujours de la marge pour en faire davantage.
« Que ce soit les Kosovars vivant au Kosovo ou ceux de la diaspora, nous devons tous considérer le Kosovo comme un pays ayant du potentiel, et nous devons nous engager pour son développement économique. Avant tout, c’est une obligation de l’État de créer un environnement juridique et économique favorable pour permettre aux jeunes de trouver des opportunités professionnelles et pour la progression de leur carrière au Kosovo. Certes, si les opportunités sont nombreuses, les alternatives devraient être nombreuses également, mais il ne faut pas qu’il y ait une seule alternative » a déclaré Kajtazi, lorsque le panel s’est demandé si la responsabilité de créer des perspectives pour les jeunes repose sur les seules ONG.
Bülent Kaya a contribué à cette discussion en apportant des données et des statistiques sur le fonctionnement général des associations en Suisse, en soulignant que le monde associatif suisse est plus dense et dynamique et que les associations contribuent à la société sous formes diverses.
« Les associations s’engagent à ce que les jeunes puissent trouver leur place dans l’espace public, qu’ils entrent dans la vie active et qu’ils restent en Suisse puisqu’ils ont la liberté de mouvement et qu’ils peuvent voyager pour élargir leurs expériences, à travers des bénévolats ou autres. Or, rester dans un pays où l’on ne voit pas de perspectives, c’est triste », a conclu Kaya.
L’évènement TAKIMI, organisé au Kosovo par l’association Albinfo.ch, s’est déroulé les 24 et 25 mars. De nombreuses tables rondes et d’autres évènements ont offert à des entrepreneurs, professionnels ou acteurs de la société civile venus de Suisse, d’Allemagne, d’Autriche, du Royaume-Uni, de Suède et du Kosovo, l’opportunité d’échanger leurs idées dans l’optique d’éventuelles collaborations futures, qui pourraient notamment contribuer à élargir les perspectives disponibles pour la jeunesse au Kosovo.
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